đ° J-107 - Je suis un Ă©crivain ratĂ©...
Comme tous les écrivains, je me heurte réguliÚrement à un ennemi sournois : le doute.
Bonjour Ă tous, et bienvenue dans cette treiziĂšme Ă©dition !
Cet email vous parvient depuis Marseille, oĂč jâai passĂ© une semaine de vacances au soleil⊠En plus de la dĂ©couverte du Vieux Port et de Notre Dame de la Garde, ces quelques jours ont Ă©tĂ© lâoccasion de bien avancer sur la rĂ©Ă©criture.
Jâai Ă©galement fini de retravailler le plan du roman, que jâai partagĂ© Ă quelques personnes pour obtenir leurs retours. Or, Ă chaque fois que lâon fait lire son travail Ă quelquâun, on se pose forcĂ©ment une question : et si ça ne leur plaisait pas ?
Cela mâa donnĂ© envie dâĂ©voquer le rĂŽle du doute dans le travail dâĂ©criture au quotidien.
Bonne lecture !
Un RĂȘve Un Seul est une newsletter bimensuelle sur les coulisses de lâĂ©criture dâun roman. Pour recevoir les prochaines Ă©ditions, vous pouvez vous abonner ici :
DâoĂč vient lâenvie dâĂ©crire ?Â
Ecrire, câest souvent passer des heures Ă sâesquinter les yeux sur un Ă©cran, ou noircir des feuilles de papier jusquâĂ en avoir mal Ă la main. Câest chercher, câest bloquer, câest hĂ©siter, câest tenter, câest Ă©chouer, câest recommencer. Quâest-ce qui plaĂźt tant dans cette activitĂ© ingrate ?Â
LâĂ©criture, et lâart en gĂ©nĂ©ral, continuent malgrĂ© tout de nous attirer parce quâils nous permettent de crĂ©er. De construire des histoires, de travailler son imagination, dâinventer des mythes et des Ă©popĂ©es, de rencontrer des personnages et de leur faire vivre des aventures⊠Câest une maniĂšre de crĂ©er un monde qui nâappartient quâĂ nous, que ce soit pour sây Ă©vader ou bien pour embellir son quotidien.Â
Lâenvie dâĂ©crire vient donc souvent de motifs internes Ă soi : le plaisir vient de lâĂ©criture en elle-mĂȘme, du travail de crĂ©ation et des efforts quâil nous rĂ©clame.Â
Mais je suis convaincu quâĂ ces motifs internes sâen ajoutent dâautres, externes cette fois, qui sont les buts que lâon cherche Ă atteindre par lâĂ©criture et la crĂ©ation.
Ces motifs sont nombreux : le fait dâĂȘtre lu est probablement le plus Ă©vident dâentre eux. Mais on peut aussi penser au dĂ©sir de plaire, dâĂȘtre admirĂ©, et mĂȘme de devenir cĂ©lĂšbre. On peut aussi Ă©crire pour gagner de lâargent, pour en faire une activitĂ© professionnelle. Enfin, on peut Ă©crire pour laisser une trace de soi, que ce soit pour ses proches, ou pour davantage. Ecrire, câest se donner une chance de devenir immortel !
Les motivations de chacun peuvent autant provenir de lâĂ©criture elle-mĂȘme quâĂ lâespoir dâatteindre un rĂ©sultat. Tout auteur se situe quelque part le long de ce vaste continuum : en Ă©crivant, nous poursuivons tous des objectifs.Â
Peut-on ârĂ©ussirâ en Ă©criture ?
La notion de rĂ©ussite est extrĂȘmement subjective, parce quâelle consiste justement Ă atteindre -ou pas- les objectifs en question. Dâun auteur Ă lâautre, les ambitions varient fortement.Â
Pour certaines personnes, le succĂšs consistera simplement Ă Ă©crire rĂ©guliĂšrement. A trouver le courage dâaller au bout dâun roman. Ou mĂȘme de plusieurs. Parfois, pour les faire lire. Parfois, mĂȘme pas.Â
Pour dâautres, le but sera dâen vivre. Câest en gĂ©nĂ©ral le critĂšre qui permet de distinguer les Ă©crivains « professionnels », dont lâĂ©criture est la principale source de revenus.Â
Pour retrouver le point de vue dâune semi-professionnelle sur le sujet, vous pouvez relire lâinterview de Maud Ventura ici
Malheureusement, ce type de profession est extrĂȘmement prĂ©caire. DerriĂšre la rĂ©ussite financiĂšre exceptionnelle dâAmĂ©lie Nothomb, Bernard Werber ou Marc LĂ©vy, la trĂšs grande majoritĂ© des Ă©crivains professionnels gĂ©nĂšrent des revenus nâexcĂ©dant pas quelques milliers dâeuros par an. En tĂ©moigne le revenu annuel minimal nĂ©cessaire pour ĂȘtre affiliĂ© Ă la caisse des artistes-auteurs, de 8800⏠par an, soit⊠733⏠par mois. Pas immense !Â
Il faut garder en tĂȘte quâun premier roman se vend en moyenne Ă 500 exemplaires, donc sachant quâun auteur peut espĂ©rer toucher 1 Ă 2⏠par livre, le calcul est vite fait⊠Mieux vaut ne pas regarder le taux horaire !Â
Bref, il est difficile de vivre de lâĂ©criture, et encore plus difficile dây faire fortune ou de devenir un auteur Ă succĂšs. DerriĂšre les quelques best-sellers qui sortent chaque annĂ©e, combien de bons livres passent inaperçus ? La rĂ©ussite tient autant aux efforts et au talent de chaque auteur, quâĂ une foule de facteurs hors de son contrĂŽle : le contexte, le rĂ©seau dont il dispose, la qualitĂ© de son Ă©diteur, les effets de mode, le buzz⊠(pourquoi est-ce spĂ©cifiquement Harry Potter, Twilight ou Fifty Shades of Grey qui sont devenus des best-sellers mondiaux ?).
En rĂ©sumĂ© : avoir du talent ne garantit pas dâavoir du succĂšs... Et avoir du succĂšs nâest pas toujours synonyme dâavoir du talent đ
LâĂ©pouvantail de lâĂ©chec
Sâengager sur la voie de la crĂ©ation, câest sâengager Ă ĂȘtre jugĂ©. A accepter lâavis des autres, les retours positifs comme nĂ©gatifs, les critiques, les jugements qui nous semblent injustes, les regards compatissants et les tapes dans le dos qui signifient « tu feras mieux la prochaine fois ».Â
Câest aussi accepter de composer avec dâautres sentiments moins rationnels, comme la peur dâĂȘtre nul, de ne jamais avoir le moindre succĂšs, de ne jamais trouver dâĂ©diteur, et, au final, dâavoir fait tout ça pour rien. Bref, tout ce quâon pourrait regrouper sous le nom de « syndrome de lâĂ©crivain raté ».Â
Or, la peur de lâĂ©chec peut rapidement devenir paralysante, et nous empĂȘcher dâentreprendre quoi que ce soit. Ne pas essayer, câest la meilleure maniĂšre de ne pas Ă©chouer, aprĂšs tout !Â
A titre personnel, je me dĂ©bats rĂ©guliĂšrement avec ce syndrome de lâĂ©crivain ratĂ©. Notamment Ă chaque fois que je me prĂ©pare Ă envoyer mon travail Ă quelquâun ! Tant que je ne montrais mes Ă©crits Ă personne, je pouvais continuer dâestimer quâils Ă©taient exceptionnels. Mais maintenant que je les partage, jâessaie de rĂ©cupĂ©rer des avis un peu plus objectifs que le mien sur la question đ
La premiĂšre fois que jâai envoyĂ© mon manuscrit Ă des Ă©diteurs, chaque rĂ©ponse nĂ©gative Ă©tait aussi douloureuse quâune gifle. Dâautant que ces refus nâĂ©taient pas accompagnĂ©s dâexplications. Câest non, et câest tout. Ca mâa rappelĂ© ma vie sentimentale Ă lâĂ©poque du lycĂ©e - mais câest une autre histoire.Â
Le premier rĂ©flexe dans ces cas-lĂ , câest de laisser tomber. Je nâai pas touchĂ© Ă mon manuscrit pendant plus dâun an. Et puis ensuite, jâai lancĂ© Un RĂȘve Un Seul. On verra si jâarrive Ă faire mieux la deuxiĂšme fois !Â
Comment lutter contre le doute ?Â
Dans lâintervalle, voici les quelques conseils que jâapplique pour lutter contre ce fameux syndrome de lâĂ©crivain ratĂ© :Â
Limiter ses attentes
Câest un rĂȘve rĂ©aliste que dâĂȘtre publiĂ© un jour. Mais je reste lucide sur le fait que mes chances dâen vivre ou mĂȘme de devenir le futur Michel Houellebecq sont trĂšs trĂšs faibles. Et ce nâest pas grave. Dans la maniĂšre dont jâimagine mon avenir pour lâinstant, lâĂ©criture reste un Ă -cĂŽtĂ©, pas mon activitĂ© principale. Ce qui enlĂšve dĂ©jĂ une bonne dose de pression !Â
Se concentrer sur les Ă©tapes
Câest toujours intimidant de penser au rĂ©sultat final quand on part de tout en bas. Est-ce que je serai un jour un Ă©crivain Ă succĂšs ? Aucune idĂ©e. Mais est-ce que je peux avoir une idĂ©e dâhistoire, puis la creuser, puis Ă©crire un chapitre, puis un second, puis les partager Ă des lecteurs, puis les corriger, puis continuer ainsi de suite jusquâĂ avoir un manuscrit partageable Ă un Ă©diteur ? Ca, je sais que oui, je peux le faire !Â
Visualiser les Ă©tapes permet de dĂ©mystifier la difficultĂ© dâatteindre un objectif de long terme.
Persévérer
Câest un conseil basique, mais câest nĂ©cessaire pour espĂ©rer arriver au bout du chemin un jour ! MĂȘme J.K. Rowling a essuyĂ© huit refus avant la publication de Harry Potter. Quand elle a finalement Ă©tĂ© acceptĂ©e, son Ă©diteur nâen a imprimĂ© que 500 exemplaires. Personne ne peut savoir Ă lâavance ce qui va se passer, y compris les professionnels du secteur. Câest en continuant dâessayer que lâon court le risque de rĂ©ussir !Â
Limiter les risques
MalgrĂ© toute lâimportance que lâĂ©criture peut avoir pour moi, jâai toujours fait le choix de poursuivre ce rĂȘve en parallĂšle de ma vie normale. Je nâai pas souhaitĂ© tout miser sur cette passion. A tort, peut-ĂȘtre. Peut-ĂȘtre quâon ne peut rĂ©ussir dans ce domaine quâen y allant Ă fond. Quâil faut accepter de tout risquer pour se donner une chance de remporter le gros lot.
Pourtant, je nâadhĂšre pas Ă cette vision idĂ©alisĂ©e. Je souhaite que ma confiance en moi soit le fruit de lâĂ©criture ET dâautres choses. Couple, amis, travail⊠La passion est une brique centrale de cet Ă©quilibre, mais elle nâest clairement pas la seule.Â
Les stats de la semaine
VoilĂ le rĂ©sumĂ© de lâavancement depuis la derniĂšre Ă©dition (16 Janvier) :
Sur le roman -
Reprise globale du synopsis et du plan de lâhistoire (8 pages ajoutĂ©es pour aboutir Ă un rĂ©sumĂ© partageable dâune trentaine de pages) (4 heures)
15 pages Ă©crites (3645 mots, 6 heures)
38 pages corrigées (9 473 mots, 3 heures)
Avancement global rĂ©Ă©criture : 56 % (+ 19% depuis 2 semaines, jâai trĂšs bien avancĂ© sur les nouvelles scĂšnes !)
Sur Un rĂȘve un seul -
6 pages Ă©crites pour cette newsletter (1550 mots, 4 heures)
1 post écrit et relu pour la promotion sur les réseaux sociaux (300 mots, léger relùchement à ce niveau-là )
Conclusion
Je suis fier dâavoir pu bien avancer ces deux derniĂšres semaines, bien aidĂ© par les vacances !
On a passĂ© le cap de la moitiĂ© de scĂšnes rĂ©Ă©crites (đ„ł), et jâai profitĂ© des 3h de TGV pour reprendre le plan du livre, je me dĂ©battais depuis un moment avec mes idĂ©es sur la fin. Avoir une vision claire de ce Ă quoi je veux aboutir Ă chaque scĂšne me permet de me mettre au travail plus facilement.
Le soleil marseillais mâa permis de recharger les batteries, donc je compte bien continuer sur ma lancĂ©e alors que nous approchons des cent derniers jours !Â
J-107.Â
Cher Alexandre, juste un petit commentaire d un vieux prof de lettres: si tu es dans le doute permanent alors tu es dans la bonne voie.. le doute ne veut pas dire pour autant que tu n iras pas au bout de ton projet mais il est nĂ©cessaire pour se sentir lecteur de soi mĂȘme et forcer la rĂ©Ă©criture jusqu a une satisfactionâŠ. PassagĂšre!đđDoute mais ne lache rien! Affectueusement Catherine birmens (daraignes)