💋 J-191 - « L'écriture est une maîtresse »
Cette semaine, j'ai pu interviewer Maud Ventura, qui a reçu le Prix du premier roman et une nomination au Prix de Flore pour son livre "Mon Mari".
Bonjour à tous !
J’espère que vous allez bien ces jours-ci, malgré des températures qui baissent et des jours qui raccourcissent. De mon côté, j’ai reçu beaucoup de messages d’encouragement suite à la dernière édition où je parlais de fatigue. Rassurez-vous : j’ai repris du poil de la bête, et je trouve de nouveau le temps d’écrire au moins une heure par jour. J’ai enfin repris la phase d’écriture après m’être débattu un moment avec le synopsis, et j’ai hâte de vous en partager l’avancement !
Les derniers jours ont aussi été l’occasion de me plonger dans un roman atypique : Mon Mari, de Maud Ventura. L’histoire d’une femme de 40 ans, mariée depuis de longues années, qui aime encore son mari avec la passion des premiers jours. Une histoire originale et très drôle, qui nous permet de découvrir cette femme follement amoureuse… Pour le meilleur et pour le pire !
J’avais contacté Maud le mois dernier après l’avoir entendue lire un extrait de son texte à la soirée de rentrée de l’école Les Mots, là où j’avais fait mon stage d’écriture il y a quelques mois. Malgré son agenda chargé en raison de la promo du livre, nous avons pu échanger au téléphone cette semaine - et j’ai appris plein de choses ! 🔥
J’espère que l’interview vous plaira. D’ailleurs, envoyez-moi un petit message si vous aimeriez découvrir davantage de discussions de ce type, que ce soit avec des écrivains, des scénaristes ou des éditeurs : c’est un format que j’aimerais beaucoup répliquer à l’avenir.
Bonne lecture !
PS : on vous a transféré cette édition ? Le contenu vous plaît ? 👇
Un premier roman salué par la critique
Sur le papier, le profil de Maud Ventura est une succession de tirets plus prestigieux les uns que les autres. Prépa littéraire, admise à l’ENS en philosophie, puis à HEC quelques années plus tard, animatrice de podcast, et aujourd’hui rédactrice en chef des podcasts chez NRJ… Lorsque je compose son numéro mercredi, j’ai peu de doutes : je m’apprête à discuter avec une bosseuse.
Mais ce qui m’intrigue surtout, c’est ce livre que je viens d’achever, Mon Mari. Maud vient seulement de fêter ses 29 ans, et pourtant, elle a déjà un roman à son actif. Un roman qui m’a beaucoup plu. Et je ne suis pas le seul : Mon Mari a remporté le Prix du premier roman, et il s’en est fallu de deux voix pour qu’il rafle également le Prix de Flore.
Mais qu’est-ce qui se cache derrière cette réussite ? Pourquoi a-t-elle commencé à écrire ? Et comment a-t-elle trouvé la force de continuer, malgré les difficultés ? Autant de questions que j’avais hâte de lui poser.
L’écriture : une évidence depuis toujours ?
“Plus tard, je serai écriviste”. C’est ainsi qu’elle imaginait son futur lorsqu’elle était petite. Qu’importe si le nom du métier n’était pas tout à fait juste : elle avait déjà cette envie de créer des histoires. La graine était plantée. Et l’envie ne l’a jamais quittée.
Pendant toutes les années qui ont suivi, les choix de Maud ont été dictés par la volonté de pouvoir réserver du temps à l’écriture. Malgré HEC, exit les carrières dans la finance ou le conseil en stratégie, et les journées de travail qui s’achèvent à minuit : le carburant de l’écriture, ce sont les heures qu’on y consacre.
Malgré ce parcours académique brillant, la jeune Maud savait qu’il n’y a pas de diplôme officiel pour devenir auteur. Que la seule manière de savoir, c’est d’écrire un manuscrit, et de l’envoyer à une maison d’édition. Et les statistiques ont de quoi faire peur : les maisons d’éditions publient moins de 1% des textes qu’ils reçoivent.
Il faut une sacrée dose de confiance en soi pour se lancer dans cette voie. Ce qui l’a aidée à développer cette confiance ? “Avoir fait une classe prépa, sans aucun doute. Passer deux ans à travailler pour un concours sur lequel 95% des candidats se cassent les dents. Quand tu réussis, malgré les obstacles… Ça t'apprend à envoyer balader les statistiques”.
L’écriture est une maîtresse : pour elle, on trouve toujours le temps
Depuis que j’ai lancé ce projet de newsletter, j’ai eu l’occasion de rencontrer pas mal de personnes évoluant dans le monde de l’écriture ou de l’édition. Mais ce qui m’intriguait en particulier avec Maud, c’est qu’elle n’est pas (encore ?) professionnelle : comme moi, elle conjugue l’écriture avec une carrière distincte. Je souhaitais donc comprendre comment elle s’organisait pour avancer de front dans ces deux voies.
Premier conseil : ce n’est pas grave d’avoir une écriture en pointillés. Évidemment, c’est louable d’écrire tous les jours, mais ce n’est pas une obligation pour réussir. Si Maud m’a dit au début de l’appel qu’elle a “toujours écrit”, ça ne l’a pas empêchée de faire des pauses régulières, de quelques jours, quelques mois, voire de deux ans lorsqu’elle était en prépa.
Et avoir publié un roman ne changera pas ce mode de fonctionnement : elle compte bien avoir des enfants, et sera très à l’aise à l’idée de faire passer l’écriture au second plan pendant quelques années. De toute façon, pour elle, l’image de l’écrivain solitaire enfermé dans sa tour d’ivoire, c’est un mythe : en réalité, gérer de front plusieurs activités est le meilleur moyen d’avancer plus efficacement dans l’écriture.
Mais comment procéder, lorsqu’on a l’impression que les heures manquent ? La solution semble se cacher dans… Les relation extra-conjugales (!)
“Est-ce que tu as déjà eu une amante ? (rires) Je suis convaincue que plus on a de temps, plus celui-ci se dilate. Si je n’avais plus que l’écriture dans ma vie, je ne pense pas que je serais plus productive qu’aujourd’hui. Écrire quand tu as une carrière, c’est comme avoir une maîtresse. Tu te débrouilleras toujours pour avoir une heure de disponible : c’est du par-ci par-là. Tu trouveras toujours une excuse pour revenir à ta passion. Prolonger ta pause dej’ de 30 minutes, partir un peu plus tôt du travail quand tu as bien bossé… J’ai toujours l’impression d’écrire sur un coin de table, ou sur le mur d’un couloir entre deux réunions. Une minute peut suffire ! Moi par exemple, je note régulièrement des choses dans mon smartphone, et je les re-travaille plus au calme, le week-end”.
C’est l’un des points qui m’a beaucoup surpris : Maud n’écrit quasiment pas la semaine. Et même si ça lui a pris du temps d’être à l’aise avec cette idée, elle se contente aujourd’hui des week-ends, des vacances ou de soirées solitaires ponctuelles.
De l’importance de bien s’entourer
Mais les 4 années de travail qui ont mené Mon Mari de l’idée à la publication n’ont pas été de tout repos. Il y a eu des moments difficiles, où elle avait envie de tout envoyer balader. Dans ces cas-là, il est fondamental d’être bien accompagné. Car si l’écriture demeure par nature un chemin solitaire, on n’est pas condamné à l’accomplir totalement seul. Ce sera le sujet de la prochaine édition, d’ailleurs !
C’est en montrant son travail à d’autres personnes que Maud a trouvé le courage de continuer. En parlant de sa passion, de ses doutes, de ses peurs, et grâce au soutien de ses amis, de sa famille, de celui avec qui elle était en couple aussi. “Je t’ai follement aimé” - ainsi s’achevait la page dédiée aux remerciements, à la fin de Mon Mari. Parfois, une aventure s’achève quand une autre commence.
Aujourd’hui, Maud Ventura est plus entourée que jamais, notamment grâce au support que lui apportent son éditrice et sa maison d’édition, L’Iconoclaste. Alors qu’elle travaille déjà sur son deuxième roman, elle m’a cependant averti : “Plus tu montres ton travail, plus tu auras de retours susceptibles de te faire changer d’avis. Et il faut les écouter, car ils t’aideront à t’améliorer. Mais parfois aussi, il faut dire non. Dire non à tes lecteurs, à tes amis, à ton éditeur. C’est toi l’auteur. C’est toi qui sais”.
Si on pense avoir du talent, alors il faut y croire.
Il faut travailler, travailler, travailler encore, et persévérer jusqu’à être fier de ce qu’on a créé.
C’est en tout cas ce que je retiens de cet échange avec la lauréate du Prix du premier roman. Merci pour le boost de motivation, Maud 😊
Et merci à vous d’avoir lu cette édition jusqu’ici, j’espère que cette interview vous aura plu ! Je vous retrouve dans deux semaines pour la prochaine édition.
J-191.