Bonjouur, 76ème édition !
Une abonnée m’a récemment contacté avec cette question : “quelles techniques narratives utiliser pour amplifier l'aspect comique d'un récit ?” (merci Laurence !)
Je ne m’étais jamais particulièrement intéressé à la mécanique qui permet de créer le rire. Pour moi, l’humour ne se commandait pas : c’était avant tout une question de répartie, d’improvisation. J’étais (très) loin de la réalité : il existe en fait tout une gamme de méthodes qui permettent de rendre un récit drôle.
Aujourd’hui, on va donc voir :
À quoi sert l’humour dans un récit
Les 4 manières de faire rire son public
Bonne lecture !
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À quoi sert l’humour dans un récit ?
Je me souviens avoir lu dans l’un des romans de Bernard Werber qu’il y a trois choses qui distinguent l’homme de l’animal : l’amour, l’art, et le rire. Le rire était déjà mentionné comme le propre de l’homme par Rabelais, et avant lui, par Aristote.
Si le rire est si puissant, c’est parce qu’il est vecteur d’émotion. Et générer des émotions, c’est le but ultime d’un bon écrivain. Comme le dit la poétesse Maya Angelou : “Les gens oublieront ce que vous avez dit, ils oublieront ce que vous avez fait, mais n'oublieront jamais ce que vous leur avez fait ressentir”.
L’humour, c’est l’outil qui permet de générer le rire chez votre lecteur, ce qui permettra de l’attacher à votre texte, à votre intrigue, à vos personnages.
Les 4 manières de faire rire son public
Il existe 4 méthodes pour séduire votre public en utilisant l’humour. Elles ne sont pas exclusives, et se cumulent au contraire très bien ensemble.
Le comique de situation
Le comique de situation surgit lorsqu’un personnage affronte des circonstances improbables, voire absurdes.
On peut penser à ce célèbre extrait d’Astérix en quête du laisser-passer A38 où le petit guerrier Gaulois affronte les affres d’une administration anachronique, ou encore à la scène de la cuisine des Tontons flingueurs où les malfrats rivaux se retrouvent à boire un coup ensemble.
C’est également ce que j’ai voulu exploiter dans ma nouvelle Une divine comédie que je vous partageais cet été, où un ange endosse le rôle d’un contrôleur de l’URSSAF :
Le comique de situation peut être amplifié en s’appuyant sur l’effet de surprise, sur le contraste entre les attentes du public et les rebondissements, ou encore sur les quiproquos entre personnages.
Le comique de caractère
Comme son nom l’indique, ce deuxième type de comique s’appuie sur le caractère d’un personnage, et sur un trait de personnalité obsédant ou poussé à l’excès chez lui afin de provoquer le rire.
Cette technique est particulièrement utile pour se moquer des défauts les plus répandus, comme le fait Molière avec son personnage d’Harpagon dans l’Avare, ou avec l’hypocrisie de Tartuffe.
Plus récemment, c’est le même mécanisme qu’exploitent des séries comiques comme The Big Bang Theory (avec l’ego surdimensionné d’un Sheldon) ou Friends (la ~légère~ obsession de Monica pour l’ordre et la propreté).
Le comique de mots
Il s’agit peut-être de la forme d’humour la proche de la vie quotidienne : l’effet comique vient ici de que disent les personnages. C’est l’occasion pour l’auteur d’imiter une véritable conversation, avec tout ce qu’elle peut comporter de blagues, de réparties et de sous-entendus.
De nombreuses oeuvres sont devenues inoubliables grâce à leurs répliques, de Cyrano de Bergerac et sa tirade du nez, jusqu’aux Bronzés et aux conseils de drague de Jean-Claude Dusse (RIP Michel Blanc 😢).
D’ailleurs, “Oublie que t’as aucune chance, fonce : sur un malentendu, ça peut marcher” : un bon conseil à retenir lorsqu’on envoie son manuscrit aux éditeurs.
Le comique de narration
La dernière forme d’humour est uniquement possible à l’écrit : c’est celle qui vient du narrateur, et de la manière dont il nous raconte l’histoire.
Le narrateur peut lui-même être un des personnages de l’histoire, à l’image de Victor Laplace, le héros du Dernier étage du monde (mon coup de coeur de l’année) qui juge avec un mépris grinçant ce monde du conseil dans lequel il a décidé de se fondre : “Les consultants, c’est comme des cafards : dès qu’ils s’insinuent chez vous, impossible de vous en débarrasser”.
La méthode est courante dans les oeuvres racontées à la première personne - en témoigne l’incipit de La petite conformiste, le premier roman d’Ingrid Seyman : “Je suis née d’une levrette, les genoux de ma mère calés sur un tapis en peau de vache synthétique”.
Mais elle marche également très bien lorsque le narrateur est extérieur à l’histoire. Par son ton et son style, il en devient un protagoniste à part entière, complice du lecteur qu’il fait sourire par ses commentaires et descriptions.
Pour conclure avec un dernier exemple, c’est ainsi que Flaubert parle de son héros Charles Bovary : “La conversation de Charles était plate comme un trottoir de rue, et les idées de tout le monde y défilaient dans leur costume ordinaire, sans exciter d'émotion, de rire ou de rêverie”.
Mes découvertes récentes
Il y a deux semaines, je vous parlais de doute lorsqu’on écrit. Sophie Gliocas a écrit un témoignage que j’ai trouvé criant de vérité, à propos de ce premier jet qu’elle vient tout juste d’achever : Mais pour qui tu te prends ?
Ça ne parle pas d’écriture, mais le thème me semble important : en plein procès des viols de Mazan, le documentaire Arte Elle l’a bien cherché permet une plongée crue dans le parcours du combattant que traversent les victimes de viols en quête de justice.
Avant de partir…
Je m’interroge sur le thème à aborder dans la prochaine édition. Qu’est-ce qui vous attire le plus ?
Conclusion
Clap de fin pour cette édition, merci d’avoir lu jusqu’ici ! Je vous parle moins de mon manuscrit en ce moment, mais je continue de progresser, j’estime en être à 75-80% du premier jet. Ça se construit, ça se construit 😄 Je vous retrouve dans 2 semaines !
J+1167.
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Super analyse et bon rappel des différents types d'humour ! Perso j'en tendance à vouloir mettre des vannes un peu partout, et ce n'est pas toujours une bonne idée ahem
Oh merci pour le partage !
Cette lettre était super chouette (je suis une grande fan du comique de situation c'est terrible comme ça me fait glousser)
Et je serais très curieuse de lire ce que tu as à dire sur l'écriture sensorielle.