đ Les grandes histoires parlent de transformation
Comment faire de l'Ă©volution des personnages la meilleure arme pour captiver le lecteur ?
Bonjour bonjour, 69Ăšme Ă©dition !
Difficile de ne pas se sentir fĂ©brile en ce jour de vote. Ma mission aujourdâhui : nous changer les idĂ©es et nous faire un peu rĂȘver, en parlant des grandes histoires et de comment elles poussent leurs personnages Ă se transformer.
Bonne lecture đ
PS : bienvenue aux 25 nouveaux abonnĂ©s, Elea, Guillaume, Victoria, Ahmed, ChloĂ©, Cricri et tous les autres đ
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Les grandes histoires parlent de transformation
Si les histoires valent la peine dâĂȘtre racontĂ©es, câest parce quâelles nous permettent de vivre la transformation dâun personnage. En ouvrant un livre, on se plonge dans un univers, un quotidien, une vie qui nâest pas la nĂŽtre. On dĂ©couvre un hĂ©ros, ses actions, ses dilemmes, ses modes de pensĂ©e, et on va lâaccompagner pendant plusieurs centaines de pages.
Tout lâintĂ©rĂȘt de lâhistoire va alors ĂȘtre de montrer la maniĂšre dont ce hĂ©ros va changer, et devenir quelquâun dâautre : une meilleure (ou une pire) version de lui-mĂȘme, quelquâun qui aura appris une leçon importante, dĂ©couvert une facette inconnue de sa personnalitĂ©, dĂ©veloppĂ© une qualitĂ© qui lui manquaitâŠ
Câest la transformation qui captive le lecteur
Jâai dĂ©jĂ parlĂ© dans les Ă©ditions prĂ©cĂ©dentes de lâimportance de la psychologie des personnages, par exemple ici ou ici. Pour que le lecteur sâattache au protagoniste, il faut que ce dernier soit cohĂ©rent, intĂ©ressant et bien caractĂ©risĂ©. Cela permet de comprendre comment il pense, ressent et agit. Mais ce nâest que la premiĂšre Ă©tape !
Si le hĂ©ros ne se transforme pas au cours de lâhistoire, le lecteur va vite sâen lasser. Câest tout lâintĂ©rĂȘt de ce quâon appelle lâarc transformationnel : la maniĂšre dont un individu Ă©volue.
Le risque : une transformation incohérente
OK, il nous faut une transformation entre le point A (au dĂ©but de lâhistoire) et le point B (Ă la fin). Mais pour quâelle soit rĂ©ussie, cette transformation doit apparaĂźtre logique aux yeux du lecteur.
Le problĂšme de beaucoup dâauteurs, câest quâils imaginent dâabord lâhistoire et ses rebondissements, et ensuite seulement, ils y insĂšrent un personnage [je sais de quoi je parle : je suis tombĂ© dans le piĂšge avec mon manuscrit dâavant].
Le problĂšme de cette approche, câest quâelle laisse un espace de dĂ©veloppement limitĂ© pour le hĂ©ros : quoi que celui-ci traverse, la prochaine Ă©tape de lâhistoire est connue, et câest donc lĂ que lâauteur va le faire aller - quâimporte si sa rĂ©action est cohĂ©rente ou pas. Or, cette incohĂ©rence risque de briser la suspension dâincrĂ©dulitĂ© du lecteur, câest-Ă -dire sa capacitĂ© Ă suivre lâhistoire sans jamais se dire ânon, câest pas crĂ©dibleâ.
Si la fin de la sĂ©rie Game of Thrones a déçu tant de fans, câest parce que toute la psychologie patiemment Ă©laborĂ©e pendant huit saisons semble finalement avoir Ă©tĂ© jetĂ©e au feu au profit dâune fin incohĂ©rente et imprĂ©visible.
La transformation doit venir du personnage - et pas de lâauteur
Pour Ă©viter ces incohĂ©rences, une seule rĂšgle, de nouveau : tout doit ĂȘtre logique. Pour lâauteur, cela signifie changer dâapproche : au lieu de penser âjâai besoin que mon personnage aille lĂ , donc voilĂ comment il va se comporterâ, il faut plutĂŽt se dire âje connais la psychologie de mon hĂ©ros, et voilĂ comment il rĂ©agirait si tel Ă©vĂ©nement lui arrivaitâ.
Dit autrement, lâhistoire se construit autour du personnage et de ses rĂ©actions aux Ă©vĂ©nements â plutĂŽt que construire un protagoniste qui nâa dâautre rĂŽle de se faire balloter par lâhistoire.
Une technique particuliĂšrement efficace, Ă©voquĂ©e par John Truby dans lâAnatomie du scĂ©nario (que jâai enfin terminĂ© cette semaine, youpi), est ce quâon appelle le rebondissement-rĂ©vĂ©lation : les changements de trajectoire du personnage seront crĂ©dibles si jamais celui-ci vit ou dĂ©couvre une chose qui lâaffecte suffisamment pour changer sa vision du monde, et ainsi modifier son dĂ©sir.
Prenons un exemple. Dans Le Roi Lion, aprĂšs la mort de son pĂšre Mufasa, le jeune Simba nâa plus quâune volontĂ© : vivre sans responsabilitĂ©s, loin des affaires du monde et du trĂŽne qui lui revient de droit. Hakuna Matata. Plusieurs mois/annĂ©es passent ainsi, sans que Simba ne change dâavis, car sa vision du monde nâĂ©volue pas : il est convaincu de ne plus compter pour personne, certain le monde est bien meilleur sans lui.
Mais lorsque son amie dâenfance Nala le retrouve et lui explique la rĂ©alitĂ© de la terrible vie dans le royaume sous le rĂšgne de Scar, Simba a une rĂ©vĂ©lation : ceux quâil aime sont malheureux par sa faute. Sa responsabilitĂ© est donc de changer les choses. Simba rĂ©alise quâil sâest trompĂ©, et quâil doit reprendre sa place, mĂȘme sâil ne se sent pas (encore) capable de le faire.
Son désir a été modifié, et le spectateur comprend pourquoi : la transformation est cohérente.
Conclusion
Le rĂŽle dâauteur me rappelle souvent celui dâun Ă©quilibriste obligĂ© de jongler avec de nombreux paramĂštres pour faire en sorte que lâhistoire tienne debout. Il faut parvenir Ă imbriquer les Ă©vĂ©nements de lâhistoire avec la psychologie du personnage, pour mener une transformation qui soit Ă la fois cohĂ©rente et intĂ©ressante Ă suivre pour le lecteur. Câest donc un jeu constant de curseurs, pas toujours facile⊠Mais hautement passionnant !
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Câest tout pour aujourdâhui ! Si vous lisez cette newsletter le jour de sa sortie, pensez Ă aller voter : la dĂ©mocratie nâest pas un rĂ©gime parfait, mais depuis la GrĂšce Antique, on nâa encore jamais rĂ©ussi Ă faire mieux. Chaque voix compte, alors nâoubliez pas de faire entendre la vĂŽtre đłïž
Je vous retrouve dans deux semaines. A bientĂŽt !
J+1048.
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NâhĂ©sitez pas Ă partager mon travail autour de vous, cela mâaide beaucoup Ă faire dĂ©couvrir la newsletter Ă de nouvelles personnes !
Ooh merci pour la mention Ă l'Ă©dition avec Ian Flemming đ
Bonjour Alexandre,
Merci pour cette newsletter, trĂšs pertinente comme Ă chaque fois.
Je crois que beaucoup d'écrivain(e)s ont fait au moins une fois cette erreur dans leur vie, qui leur a servi d'expérience : faire agir un personnage selon le besoin de l'intrigue et pas selon sa personnalité, voire plus visible encore, ses compétences. Les retours de relectures sont en général assez tranchants quand ça arrive...
Je suis 100% d'accord avec toi sur ce que tu préconises !
Bon dimanche
Georges
PS : je viens de voter ;-)